Qu’est-ce que l’agriculture synergétique ?

Sur la base des principes de l’agriculture naturelle élaborés par l’agronome japonais Masanobu Fukuoka, l’agricultrice espagnole Emilia Hazelip a développé depuis les années 1980 une méthode de culture innovante, en adaptant ces enseignements au climat méditerranéen.

C’est ainsi qu’est née l’agriculture synergique, la forme de culture la plus naturelle qui soit, qui reconnaît l’utilité du seul paillage et répudie l’utilisation de tout type d’amendement du sol, car elle considère que le sol améliore sa fertilité s’il est cultivé avec la densité maximale de plantes et traité correctement.

Guide pour un potager en permaculture 1A partir de l’observation de ce qui se passe spontanément dans la nature, Fukuoka a développé quatre principes pour parvenir à une forme d’agriculture plus en harmonie avec la nature et non polluante. Voyons voir ce qu’ils sont :

1) Pas de travail du sol, car le sol fonctionne de lui-même grâce à la pénétration des racines et à l’activité des micro-organismes, des insectes, des vers de terre et d’autres petits animaux

2) Pas d’engrais chimique ni de compost préparé, car le sol laissé à lui-même préserve et augmente sa fertilité

2) Pas de désherbage, car les herbes indésirables ne doivent être que contrôlées, mais pas éliminées

4) Pas de dépendance aux produits chimiques, car si la nature est laissée à elle-même, elle reste en parfait équilibre.

Depuis les années 1930, Fukuoka tente de démontrer que l’agriculture peut être pratiquée simplement en respectant la dynamique des organismes vivants naturellement présents dans le sol, en répudiant le principe de l’agriculture traditionnelle selon lequel les plantes tirent leur fertilité du sol, qui doit donc être réintégré des éléments utiles perdus par la récolte. Au contraire, l’agronome japonais a toujours soutenu que si le sol fait pousser les plantes, celles-ci créent un sol fertile grâce à leurs exsudats radicaux, aux résidus organiques libérés et à leur activité chimique, ainsi qu’aux microorganismes, bactéries, champignons et vers de terre.

La première préparation du jardin synergétique consiste à créer des palettes, c’est-à-dire des plates-bandes surélevées avec de la terre excavée sur place, qui ne doit plus jamais être écrasée et compactée. Les palettes aident à aérer le sol compacté et peuvent être fabriquées en différentes formes et tailles. Pour y accéder, des passages spéciaux seront utilisés. La forme des palettes peut être droite, incurvée ou en forme de mandala. La largeur optimale est de 120 centimètres, pour la longueur il n’y a pas de limites mais il est préférable de laisser des passages tous les quatre à huit mètres, la hauteur optimale est de 30-40 centimètres, tandis que la largeur des zones de passage doit être d’au moins 50-60 centimètres, pour permettre le passage d’une brouette.

Utilisation des palettes

Guide pour un potager en permaculture 2Les palettes peuvent être fabriquées simplement à la main avec des bêches et des pelles, tandis que la couche de surface peut être façonnée à l’aide d’un râteau. Si pour notre jardin synergique nous intervenons sur des sols fortement exploités et érodés, il est conseillé d’utiliser un apport de l’extérieur du sol et du compost ou du fumier déjà décomposé, en prenant soin de cultiver la première année des plantes non comestibles ou non assimilables (chicorée, bette), pour accélérer l’évolution du sol.

En revanche, si la zone en question a été préalablement traitée avec des produits chimiques, il est bon de commencer par cultiver une ou plusieurs plantes (trèfle, chicorée, moutarde), qui vont métaboliser les résidus toxiques contenus dans le sol et lui fournir un premier apport de matière organique. Dans le cas de sols fortement compactés ou colonisés par des ronces, avant le travail superficiel du sol, il est nécessaire d’intervenir par un travail minutieux de cambriolage et d’arrachage des racines.

Guide pour un potager en permaculture 3Si, par contre, la surface choisie est sujette à la stagnation de l’eau, il est bon de planter des saules, des aulnes et d’autres espèces ayant un effet drainant à proximité. Enfin, si nous sommes en présence de terres en jachère ou précédemment traitées comme un jardin potager biologique, nous pouvons procéder immédiatement aux semis et au repiquage. Si la zone de votre jardin n’est pas correctement protégée par des arbres ou des arbustes autour, essayez également de créer une haie coupe-vent avec des espèces indigènes.

En ce qui concerne l’irrigation, la méthode recommandée pour le jardin synergétique est la méthode du goutte à goutte, qui permet d’économiser beaucoup d’eau et évite de mouiller la partie aérienne des plantes. Pour le fabriquer, il suffit d’utiliser des tuyaux en polyéthylène de 12 à 16 mm de diamètre, fixés au sol avec du fil de fer grossier plié en U, sous la couche de paillage. Dans le cas de jardins de plus de 100 m2, il est conseillé d’insérer des goutteurs spéciaux dans les trous, pour assurer une irrigation plus uniforme. Un filtre doit alors être placé en amont du système pour éviter l’obstruction des trous.

Une culture sans arroser grâce au paillage

Guide pour un potager en permaculture 4Nous arrivons alors à une opération fondamentale pour ce type d’horticulture, le paillage des palettes, qui a pour fonction de : protéger le sol du gel et du compactage et du ruissellement opérés par les agents atmosphériques ; réduire la perte d’humidité ; faciliter la colonisation de la microfaune et des microorganismes utiles au sol et, enfin et surtout, empêcher le développement des mauvaises herbes et la propagation des agents pathogènes.

Pour ce processus, on peut utiliser de la cellulose de paille (provenant de l’agriculture biologique) ou d’autres matériaux tels que des feuilles (pas d’aiguilles de conifères), des résidus végétaux de plantes herbacées sans graines, des déchets d’élagage hachés, de la sciure, du carton alimentaire, etc. Le paillage doit toujours être biodégradable – pour se transformer en compost – et affecter également le passage entre les palettes.

Une culture qui prend de la hauteur, grâce aux tuteurs

Guide pour un potager en permaculture 5Avant le début de la culture, le jardin synergétique nécessite également l’installation de supports végétaux permanents, constitués de tiges de construction en fer tordues (six mètres de long et 10-12 millimètres de diamètre), qui forment des arcs d’environ deux mètres de haut, reliés entre eux par du fil de fer. Les croisillons servent de support aux espèces grimpantes, soutiennent celles qui ont une forte densité de feuillage et empêchent les variétés qui se développent en hauteur d’encombrer les passages, permettant à la lumière et à l’air de filtrer entre les plantes. Des cordes biodégradables (chanvre, sisal, etc.) sont utilisées pour attacher les plantes aux croisillons.

Implantation

Nous en sommes donc aux semis et aux repiquages, qui doivent être bien planifiés pour assurer la couverture constante des palettes à tout moment de l’année, avec des plantes destinées à l’alimentation, des plantes aromatiques, ornementales et médicinales. Pour une synergie optimale, il doit y avoir au moins trois espèces de plantes différentes, dont au moins une variété de légumineuses (haricots, fèves, pois, pois chiches, etc.), qui fixent l’azote atmosphérique au sol, et une de liliacées (ail, oignon, poireau, etc.), excellente à des fins antibactériennes, à placer dans les bandes périmétriques des palettes.

Les plantes aromatiques (sauge, romarin, origan, thym, etc.) doivent être placées au même endroit, tandis que les plantes ornementales peuvent être placées partout, ce qui rend le jardin plus agréable et plus parfumé. Les herbes spontanées, en revanche, doivent être enlevées à la main et coupées uniquement lorsqu’elles ont tendance à étouffer les espèces cultivées, car elles contribuent généralement à assurer une couverture constante des palettes et, dans certains cas, elles peuvent également être comestibles ou curatives (moutarde, pourpier, pariétaire, etc.).

Toujours en ce qui concerne la disposition des légumes, les légumineuses, les tomates, le basilic, les courgettes, les potirons et les aubergines doivent de préférence être placés dans la partie plate des palettes, les pommes de terre sont bien partout, tandis que les banques doivent être réservées aux carottes, aux salades, aux radicchio, aux chicons et aux bettes.

Rotation des cultures

Guide pour un potager en permaculture 6Quelques recommandations : dessinez votre plan de jardin chaque année, en alternant au fil du temps les plantes qui ne laissent pas de racines avec d’autres qui libèrent de la biomasse souterraine dans le sol après la récolte, et ne ramassez que les feuilles extérieures de chicorée et de bette à carde pour permettre aux plantes de continuer à végéter. Contrairement à tous les autres jardins, le jardin synergétique permet la coexistence de plantes saisonnières et vivaces, de sorte qu’un même légume peut être présent simultanément à différents stades.

Cette forme révolutionnaire d’horticulture croit non seulement à la succession des plantes, mais aussi à l’importance de leur proximité. Il est donc très important de les combiner, ce qui permet de mieux occuper l’espace et d’en tirer le meilleur parti (par exemple, en combinant des espèces à cycle court avec des espèces à cycle long comme les radis et les carottes respectivement), de rendre le sol plus couvert, plus productif et moins sujet au développement d’herbes sauvages, ainsi que de profiter de l’effet préventif contre les pathologies ou répulsif pour les insectes phytophages (par exemple, carotte avec poireau ou oignon). Récolter dans le jardin synergétique signifie aussi ne jamais déraciner les plantes (sauf les carottes, les oignons, etc.) afin de laisser les racines se décomposer dans le sol.

L’agriculture synergétique est basée sur le principe de « vivre sans destruction » et rejette l’utilisation d’herbicides et de pesticides. Pour lutter contre les espèces animales et les insectes nuisibles aux cultures, on met donc en œuvre des stratégies de lutte naturelles qui visent à créer des conditions environnementales favorables pour toutes les espèces qui tiennent à distance les espèces nuisibles.

Favorisez la venue des auxiliaines

Guide pour un potager en permaculture 7Les hérissons, les chauves-souris, de nombreux oiseaux, amphibiens et reptiles remplissent cette fonction positive : pour favoriser leur présence, il suffit donc d’adopter certaines mesures, telles que la conservation des arbres et des arbustes à proximité du jardin ou la création de nouvelles haies et rangées d’arbres, l’installation de nids artificiels pour les oiseaux ou de boîtes à chauves-souris, la construction de piles de pierres, des branches et des feuilles dans des zones abritées et protégées afin de créer des abris et des environnements d’hivernage pour les hérissons, les crapauds et les reptiles, ou la création de petits étangs sans poissons et avec une végétation indigène pour encourager la reproduction des amphibiens et des insectes prédateurs tels que les libellules.

Guide pour un potager en permaculture 8Enfin, il existe également des découvertes naturelles qui augmentent la résistance des cultures aux maladies et aux attaques d’insectes nuisibles. Essayez, par exemple, la décoction de menthe comme répulsif contre les fourmis, la décoction de peau d’oignon pour combattre les acariens et prévenir les maladies fongiques, ou la macération d’orties pour éloigner les insectes.

Bref, si vous voulez vivre un jardin encore plus naturel que le jardin biologique, il vous suffit d’essayer la synergie !

Julien

Julie

Julie, j'ai créé ce blog il y a deux ans. Alban m'a rejoint récemment pour m'aider sur la partie technique mais aussi pour vous faire découvrir des recettes végétariennes. Au programme du blog des astuces pour une vie plus écologique et responsable ainsi qu'une rubrique life style éthique (selon mes critères, hein :D ).

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